NOTRE SOUS-SOL, UN VERITABLE " MOKA"



Notre terre,
un sujet simple, mais particulièrement surprenant


Est l'un des deux éléments constitutifs de notre environnement, l'autre étant nos cours d'eau. Ce sol, est la remarquable oeuvre de la nature, adaptée par les hommes, mais cela nous l'avons déjà dit.


Le territoire communal de Guécélard, ne compte plus de " lieux sauvages " dans la définition stricte du terme, ceux qui pourraient encore porter cette dénomination, sont des pinèdes, aménagées depuis le XIXème siècle. Ce sont pour l'instant des endroits ponctuels.  Le bocage typiquement guécélardais victime du remembrement, lui a irrémédiablement disparu. 


L'habitat est un élément essentiel d'une culture, c'est une partie essentielle de notre patrimoine Intimement lié au paysage et à l'homme qui y réside, il correspond à une  manière de vivre. Naguère, on avait le droit de construire n'importe où et n'importe comment : on ne le faisait pas.


De la richesse du temps passé, il ne reste au total que peu de choses. Tout le reste est habillé par une urbanisation variée qui exprime un avenir différent.
Ce souci de violenter la nature pour palier à un contexte, est un handicap au charme disparu.


C'est au delà de la berge gauche de la rivière Sarthe, en aval de la limite communale de Spay que ce développe le territoire de la commune de Guécélard, adossé aux hauteurs du Pôlinois.


Ce sol particulier, sur lequel nous déambulons au quotidien, que l'on ne remarque même pas tant il nous est familier, a une histoire, cette histoire est, elle aussi une autre portion  de notre patrimoine commun.




Genèse, d'un fait hors de la mémoire......
un passionnant voyage à rebours !


Il aura fallu quelques 200 millions d'années à réunir en un seul et même continent : la Pangée - un Mega-continent, toutes les terres éparpillées sur l'ensemble des océans recouvrant notre planète, il lui en faudra 200 millions d'années pour séparer les continents et les disperser à nouveau pour qu'ils aient l'aspect que nous leur connaissons, à l'emplacement qu'ils ont de nos jours ; et ce n'est pas fini la vitesse d'expansion de l'Océan Atlantique est de 2 cm/an, le continent Nord américain se déplace vers l'Ouest et le Sud-ouest à la vitesse de 1,15 cm/an ou encore à la vitesse de 0,7486° par million d'année. 
Cela peut apparaître infiniment long, mais en rapport avec l'immense durée qui s'est écoulée entre la consolidation de la croûte terrestre vers -4600 M.a., dénommé Précambrien, et le début du Paléozoïque connu sous le nom d'ère Primaire ( 543 M.a. ) ; c'est une pichenette.


Mais nous n'allons pas entraîner le lecteur dans ce type de labyrinthe, et nous même nous égarer dans ce dédale des temps trop anciens.


Nous pensons, qu' il était indispensable de rappeler ces faits pour mémoire, pour la suite de ce texte nous allons beaucoup emprunter aux rapports du B.R.G.M. du Professeur Ch. POMEROL et de son équipe.




Notre sol, s'est constitué cataclysmes après cataclysmes........
les eaux marines ont étoffé notre sous-sol,
bien avant que les eaux de la rivière Sarthe n'en modèle la surface




Vers la fin de l'ère Primaire, la Pangée, ce super continent englobait pratiquement toutes les terres émergées. Après un temps de repos, l'activité terrestre reprend.
Au cours de l'ère Secondaire - Mésozoïque, notre département a été sous les eaux marines à deux reprises. Non pas un  océan profond, sujet aux tempêtes, mais une mer chaude, peu profonde environ 35 mètres, peu agitée, animée par endroits des courants marins, sous un climat de type tropical.
Venant du continent voisin, de nombreux cours d'eau alimentés ou provoqués par les pluies à caractère aliséen, créaient des dépôts détritiques à leurs confluents. 




Première transgression marine
" Les mers du Jurassique dans notre région "


De ces temps immémoriaux, nous retrouvons dans notre sol, sous nos pieds lors de travaux agricoles, d'urbanisations et autres, des vestiges qui témoignent incontestablement si besoin est. Nous appelons cela : des fossiles,  ce sont ceux d'ammonites, de brachiopodes, de bivalves, d'oursins, d'éponges, et quelques autres plus caractéristiques comme ceux de prédateurs. Ces  animaux ont vécu, certaines espèces ont évolué, d'autres ont été spécifiques ; dans les eaux marines qui recouvraient notre sol sur une hauteur de 30 à 35 mètres.


Ainsi, commence au début du Jurassique inférieur, appelé également Lias - 205 M.a., une longue période de dépôts marins, dénommée " sédimentation marine qui a durée 60 millions d'années ". Ces dépôts varient de 436 mètres à l'Est à 250 mètres à l'Ouest.


Transgressives les unes par rapport aux autres, les mers plus uniformément chaudes et stables qu'au Trias de 245 à 205 M.a., gagnent sur le domaine continental résiduel. Venant de l'Orléanais, la mer progressant vers l'Ouest submerge, s'avance sur le socle de la plateforme hercynienne, représentée par la marge orientale fortement érodée du Massif Armoricain, s'infiltrant par les vallées, profitant des " cuvettes " datant du Trias, contournant les reliefs et isolant les crêtes ( transformant le Massif de Perseigne en île , au large d'une côte plus ou moins découpée, représentée par les " Alpes Mancelles" et la " Chaîne des Coévrons". Ces reliefs résiduels ont très certainement joué un rôle important dans cette sédimentation.


Les premiers dépôts colmatent, égalisent le socle particulièrement irrégulier, bien que très érodé de la marge orientale du Massif Armoricain, d'âge hercynien. Cette sédimentation carbonatée recouvre la plateforme littorale aux eaux agitées. Elle présente un pendange de 20° vers le Sud-ouest.


La sédimentation du Jurassique moyen - Dogger se caractérise par une forte dominance des formations calcaires, avec tout son cortège de faciès plus ou moins marneux. Les mers, très peu profondes, bordées par des terres faiblement émergées et sans reliefs, sont plus chaudes qu'au Jurassique inférieur. Elles se peuplent d'une grande diversité d'organismes. 


Ainsi, dans note proche région, comme pour valider,


- le Bajocien ( de 176 à 167 M.a. )affleure dans le " dômes de Saint Benoit - prés de La Suze" - une coupe de la structure anticlinale ; les couches appartenant à l'Aalénien-Bajocien
- le Bathonien ( de 167 à 160 M.a. ) peut être observé dans le " dôme de Saint Benoit" et à "Téloché". 


- le Callovien inférieur ( Callovien de 160 à 154 M.a. ), apparaît largement dans le " horts du Bélinois au nord de Téloché".  La présence de céphalopodes d'affinités nordiques, donne  à penser une modification climatique
- l'Oxfordien inférieur ( Oxfordien de 154 à 146 M.a. )sont visibles près d'Arnage, où il constitue les argiles et calcaires de la Vacherie, et surtout dans le Bélinois.


Un climat plus chaud réapparaît à l'Oxfordien moyen, avec un  recul marin et  une sédimentation carbonatée, développant sur la frange extrême du Massif Armoricain de modestes constructions récifales. Dés l'Oxfordien supérieur la régression se confirme, du fait du retrait des eaux marines de nombreuses terres émergent, un  nouveau littoral se dessine avec des faciès deltaïques et lagunaires, où une faune subaquatique prolifère ( Gomphotherium et autres ). A la fin du Jurassique supérieur - Malm ( de 154 à 135 M.a. ), s'amorce une régression généralisée  des mers, avec  la formation d'importants dépôts continentaux. Sur les continents se développe une végétation très diversifiée. C'est l'époque où s'affirme la suprématie des grands dinosaures tant herbivores que carnivores. 






Deuxième transgression marine
" La mer cénomanienne"
Au  début du Crétacé supérieur, nouvelle et très importante transgression marine


Dans la partie occidentale du département de la Sarthe, le socle Armoricain apparaît  sous une couverture de strates, de couches superposées découlant de transgressions alternées pendant toute la période du Jurassique et pendant la période du Crétacé supérieur ; empilées les unes sur les autres. Fracturées selon une direction Sud-ouest / Nord-est jalonnant le  " horts du Bélinois ".


- le Cénomanien  inférieur, l'argile glauconnieuse à minerai de fer, est un dépôt transgressif reposant sur ceux du Jurassique. 


- le Cénomanien moyen et inférieur, est dénommé " sables du Maine ", appelés également " sables cénnomaniens " ils constituent un ensemble détritique grossier reposant sur une base argileuse glauconnieuse à minerai de fer, par l'intermédiaire d'une surface de ravinement. Cette formation atteint à l'aplomb du Vieux Bourg de Guécélard 40 mètres d'épaisseur. Fréquemment en sous-sol  on rencontre des bancs de sables grossiers cimentés  par de l'oxyde de fer constituant des grès, dont les couleurs varient du brun - violacé à l'ocre, localement appelé " roussard", sans relation avec  la stratification. 


Ainsi, on peut dire que 80% du territoire communal de Guécélard repose sur des sables du cénomanien moyen, dont l'épaisseur oscille de 35 à 45 mètres. En 1847, d'Orbigny définissait le stratotype, devenu international du " Cénomanien ".


Il y a 96 M.a., le Crétacé supérieur débute avec ce qui fut appelé la grande transgression cénomanienne, déjà amorcée  à l'Albien ( 108 M.a. ) qui à nouveau recouvre notre territoire. Notre département  se trouvait alors situé dans un vaste golfe largement ouvert vers le Sud-est délimité par les hauteurs du Perche, incluant le Massif de Perseigne au Nord, dans l'arrondi les Alpes Mancelles,  prolongée vers le Sud par les Coëvrons puis le  Massif de la Charnie, s'amenuisant vers le " seuil " où se rejoignent la Sarthe et le Loir.


Cette phase marine s'accompagne pour nous de dépôts argileux et sableux.


Il est à noter que le taux moyen du soulèvement des Alpes Mancelles est de 6  millième de millimètre par an depuis le Pliocène (de 5,3 M.a. ). Si, il n'a à ce jour pas contribué à modifier le cours de la Sarthe, il est évident que cette élévation influe  sur l'affaissement du centre de la " cuvette dite du Mans ".


- par la D.251, de La Suze en direction de Parigné-le-Pôlin, jusqu'à l'intersection de R.D.323, le sous-sol est formé de sables cénomaniens, perméables, dans un paysage continu de pins. 


Avec le Maestrichien, se termine non seulement le Crétacé supérieur, mais également le Mésozoïque " l'ère Secondaire ", est marqué par une régression générale consécutive à une amorce de glaciation polaire. Cette crise climatique d'une ampleur exceptionnelle, qui a provoqué, aussi bien dans le domaine marin que continental et chez les invertébrés comme chez les vertébrés, l'extinction d'un nombre considérable de lignée parmi celles qui avaient le plus fortement dominé.


Le Pléistocène ( de 1,7 M.a. à 10 000 ans ) dominé par les glaciations  de Günz 1,6 à 0,07 M.a. ; Mindel de 0,5 à 0,3 M.a. ; Riss de 0,2 à 0,1  M.a. ; Würm de 80 000 à 10 000 ans, en créant de rigoureuses alternances climatiques, modèlent notre géographie, participe à la mise en place de notre réseau hydrographique tel que nous la connaissons de nos jours. Avec la géomorphologie, notre sol se couvre de sédiments fluviaux interglaciaires, puis il est recouvert d'une ultime couche de dépôts éoliens glaciaires validant l'importante déflation Würmienne du Carrefour du Bourray.


Notre sol garde en mémoire ( les vues aériennes  témoignent ) l'importance d'un réseau hydrographique fossile, sur notre terroir, pouvant expliquer les reptations latérales de la Sarthe. 


En ces temps hors de la mémoire humaine la Manche n'existait pas, le fleuve  Loire se jetait dans l'Océan Atlantique à environ 120 km à l'Ouest de Saint Nazaire, la banquise polaire descendait jusqu'à Londres, et couvrait la moitié des Pays-Bas, et a mesuré jusqu'à 1500 mètres d'épaisseur.


par André Gobenceaux

le 28 mars 2010
( ce blog est en cours )